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Résiliation de plein droit du bail commercial pour défaut de paiement de créances postérieures au jugement d’ouverture : le juge-commissaire ne peut pas accorder de délai de paiement

[20/05/2022]

Lorsque le juge-commissaire est saisi, sur le fondement de l'article L. 641-12, 3°, du Code de commerce, d'une demande de constat de la résiliation de plein droit du bail d'un immeuble utilisé pour l'activité de l'entreprise, en raison d'un défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire du preneur, il doit se borner à constater la résiliation du bail si les conditions en sont réunies et ne peut accorder aucun délai de paiement.

Faits et procédure. 

La locataire de locaux commerciaux a été mise en liquidation judiciaire. Le juge-commissaire a autorisé la cession du fonds de commerce de la débitrice et la SCI a demandé au juge-commissaire de constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers dus postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire.

Sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Paris (CA Paris, 5-9, 24 septembre 2020, n° 19/19026 ) a notamment constaté la résiliation de plein droit du bail. La locataire a donc formé un pourvoi en cassation

Pourvoi.

Elle soutenait notamment que le juge-commissaire, saisi d'une demande de résiliation judiciaire de plein droit du bail commercial, a le pouvoir d'ordonner des délais de paiement, de sorte qu’en retenant l'inverse, la cour d'appel aurait méconnu ses pouvoirs, en violation des articles 1343-5 du Code civil I et R. 641-21 du Code de commerce U.

Décision.

La Cour de cassation rejette le pourvoi nous livrant une solution de principe.

Elle rappelle un premier principe qu’elle a dégagé dans le précédent arrêt de cassation rendu dans cette affaire (Cass. com., 9 octobre 2019, n° 18-17.563, FS-P+B+I, préc., E. Le Corre-Broly) : lorsque le juge-commissaire est saisi, sur le fondement de l'article L. 641-12, 3°, du Code de commerce , d'une demande de constat de la résiliation de plein droit du bail d'un immeuble utilisé pour l'activité de l'entreprise, en raison d'un défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire du preneur, cette procédure, qui obéit à des conditions spécifiques, est distincte de celle qui tend, en application de l'article L. 145-41 du Code de commerce, à faire constater l'acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail.

Elle en avait alors conclut que le bailleur, qui agissait devant le juge-commissaire pour lui demander la constatation de la résiliation de plein droit du bail, sans revendiquer le bénéfice d’une clause résolutoire, n’était pas dans l’obligation de délivrer le commandement exigé par l’article L. 145-41 du Code de commerce (v. pour un rappel récent, CA Aix-en-Provence, 28 avril 2022, n° 18/03846  : A68537UD, V. Téchené, Lexbase Affaires, mai 2022, n° 716 .

On notera qu’elle a rappelé cette solution peu de temps après l’étendant même au cas dans lequel le locataire fait l’objet d’une sauvegarde ou d’un redressement judiciaire (Cass. com., 15 janvier 2020, n° 17-28.127, ,).

Dans l’arrêt du 18 mai, la Haute juridiction, complétant sa jurisprudence sur la question, ajoute que dans un tel cas, le juge-commissaire doit se borner à constater la résiliation du bail si les conditions en sont réunies et ne peut accorder les délais de paiement prévus par l'alinéa 2 de ce dernier texte, qui est inapplicable, ni même faire usage de la faculté d'accorder des délais de paiement en application de l'article 1343-5 du Code civil, le seul délai opposable au bailleur étant le délai de trois mois prévu par l'article R. 641-21 du Code de commerce, pendant lequel il ne peut agir.

Ainsi, pour la Haute juridiction l'arrêt d’appel a exactement retenu qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge-commissaire, saisi sur le fondement de l'article R. 641-21, alinéa 2, du Code de commerce, d'accorder des délais de paiement.

Article paru dans LEXBASE et rédigé par Vincent Téchené 

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