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Poursuite de la caution d'un débiteur placé en procédure collective : précision relative au titre exécutoire (Cass. com., 13 décembre 2023, n° 22-18.460)

[19/01/2024]

Le créancier d'un débiteur placé en procédure collective, muni d'un titre exécutoire, ne peut en poursuivre l'exécution forcée contre les biens de la caution qu'à la condition que la créance constatée par le titre soit exigible à l'égard de cette caution et dans la mesure de cette exigibilité. Le titre exécutoire n'a pas à préciser que son exécution ne sera possible sur les biens de la caution que lors de l'exigibilité des créances.

? Le créancier d'un débiteur placé en procédure collective, muni d'un titre exécutoire, ne peut en poursuivre l'exécution forcée contre les biens de la caution qu'à la condition que la créance constatée par le titre soit exigible à l'égard de cette caution et dans la mesure de cette exigibilité. Le titre exécutoire n'a pas à préciser que son exécution ne sera possible sur les biens de la caution que lors de l'exigibilité des créances.

Faits et procédure. Le gérant d’une société s'est rendu caution solidaire de cette société au profit d’une banque en garantie d'un prêt de 150 000 euros, consenti le même jour et remboursable en 120 mensualités, puis, dans la limite de 146 000 euros, en garantie de toutes les sommes que pourrait devoir la société.

La société a cédé une créance professionnelle à la banque, qui l'a notifiée au débiteur cédé. La société ayant été mise en redressement judiciaire, la banque a déclaré au passif une créance au titre du prêt, du solde débiteur du compte courant et de la créance professionnelle cédée.

Après avoir vainement mis en demeure la caution de rembourser le prêt, la banque a obtenu d'un juge de l'exécution l'autorisation d'inscrire une hypothèque provisoire sur l'un de ses immeubles. La banque a ensuite assigné la caution afin d'obtenir un titre exécutoire contre elle et sa condamnation au paiement de la totalité des sommes dues au titre du prêt, du solde débiteur du compte courant et de la créance professionnelle cédée.

L'instance a été suspendue en raison de la procédure de redressement judiciaire en cours. Puis, le plan de redressement de la société a été arrêté, prévoyant le paiement sur une durée de dix ans de la totalité des sommes échues au jour de l'ouverture de la procédure. L'instance introduite contre la caution a alors repris.

La cour d’appel d’Agen (CA Agen, 13 avril 2022, n° 21/00146 N° Lexbase : A45707TG) a condamné la caution, en exécution de ses engagements, au paiement de diverses sommes au titre du prêt, du solde débiteur du compte courant et de la créance professionnelle cédée. La caution a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation rappelle que le selon l'article L. 622-28, alinéas 2 et 3, du Code de commerce N° Lexbase : L1072KZQ, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 de ce code N° Lexbase : L9175L7X, le créancier bénéficiaire d'un cautionnement consenti par une personne physique en garantie de la dette d'un débiteur principal mis ensuite en redressement judiciaire peut prendre des mesures conservatoires sur les biens de la caution et doit, en application des articles L. 511-4 N° Lexbase : L5916IRK et R. 511-7 N° Lexbase : L4396MA3 du Code des procédures civiles d'exécution, introduire dans le mois de leur exécution une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire couvrant la totalité des sommes dues, à peine de caducité de ces mesures.

Il en résulte, selon la Haute Cour, que si l'obtention d'un tel titre ne peut être subordonnée à l'exigibilité de la créance contre la caution, le créancier muni de ce titre ne peut toutefois en poursuivre l'exécution forcée contre les biens de la caution qu'à la condition que la créance constatée par le titre soit exigible à l'égard de cette caution et dans la mesure de cette exigibilité, conformément aux dispositions de l'article L. 111-2 du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L5790IRU, le contrôle de cette exigibilité relevant, en application de l'article L. 213-6 du Code de l'organisation judiciaire N° Lexbase : L7740LPD, de l'appréciation du juge de l'exécution en cas de contestation soulevée à l'occasion de l'exécution forcée du titre.

La Cour de cassation en conclut que « la cour d'appel, qui n'avait pas à préciser que l'exécution de son arrêt ne serait possible sur les biens de [la caution] que lors de l'exigibilité des créances, a, sans méconnaître le droit de propriété de [cette dernière] fait l'exacte application des textes précités en le condamnant à payer les sommes dues au titre de son engagement de caution ».

Observations. La Cour de cassation rappelle fréquemment que l'obtention du titre exécutoire ne peut être subordonnée à l'exigibilité de la créance contre la caution (v. not. Cass. com., 1er mars 2016, n° 14-20.553, F-P+B N° Lexbase : A0730QYP ; Cass. com., 8 septembre 2021, n° 19-25.686, F-D N° Lexbase : A258044C, E. Le Corre-Broly, Lexbase Affaires, septembre 2021, n° 690 N° Lexbase : N8920BYZ).

L’arrêt rapporté apporte ici une précision supplémentaire concernant le titre exécutoire, lequel n’a donc pas à mentionner que son exécution ne sera possible sur les biens de la caution que lors de l'exigibilité des créances.

Au demeurant, il convient de ne pas oublier que la possibilité d’obtenir le titre de condamnation du garant lorsque des mesures conservatoires ont été pratiquées n’autorise pas l’exécution du titre tant que le plan de sauvegarde ou de redressement est correctement exécuté.

 

Source LEXBASE AFFAIRE n° 780/11 janvier 2024  - Article de M. Vincent Téchené 

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