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[Jurisprudence] La distribution de dividendes, une faute de gestion en matière d’action en comblement de l'insuffisance d'actif

[04/05/2021]

Le fait de convoquer l’assemblée générale qui va autoriser une distribution inappropriée de dividendes constitue une faute de gestion susceptible d’entraîner la responsabilité du dirigeant. (Cass. com., 8 avril 2021, n° 19-23.669)

En l’espèce, Une société est placée en redressement, puis en liquidation judiciaire.

Le liquidateur décide d’assigner, dans le cadre d’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif, le dirigeant, lui reprochant une faute de gestion tenant à une
distribution fautive de dividendes.


Les juges du fond font droit à la demande du liquidateur. Pour résister, le dirigeant soulève le fait que la décision de distribution
de dividendes n’était pas son oeuvre, mais la suite d’un vote de l’assemblée générale des associés.

En d’autres termes, le dirigeant n’aurait pas commis de faute de gestion dans le cadre de cette distribution de dividendes, puisque la décision ne lui
appartenait pas, mais qu’elle devait être prise par l’assemblée générale.


L’argument ne convainc pas la Cour de cassation et le pourvoi va être rejeté.

Selon la Cour, « si la décision de distribution des dividendes relève […] de l’assemblée générale des associés, après approbation des comptes annuels et constatation de
l’existence de sommes distribuables, cette assemblée est convoquée par le dirigeant ». La Cour de cassation poursuit en
indiquant que, « dès lors, c’est M. A. qui, en sa qualité de gérant de la société A, a provoqué les décisions de distributions de
dividendes qu’il a ensuite prises en assemblée générale […] en qualité de représentant légal de la société X, associé unique de la
société Y
».

Ainsi, selon la Cour de cassation, s’il est exact que la décision de distribution est prise par l’assemblée, cette décision présuppose
que le dirigeant convoque l’assemblée à cette fin. Il contribue, par conséquent, à la distribution de dividendes qui va elle-même
contribuer à l’insuffisance d’actif.


La question de la faute de gestion ne peut en conséquence être dissociée de l’observation que la faute n’a pas besoin d’être à
l’origine exclusive du préjudice ; elle n’a pas besoin de le causer.

Il faut, mais il suffit, qu’elle y contribue. Et c’est incontestablement le cas. Si le dirigeant ne prend pas la décision de convoquer l’assemblée en mettant à l’ordre du jour la
décision de distribuer des dividendes, cette distribution ne pourra avoir lieu.


En l’espèce, la situation était d’autant plus topique que l’associé ayant à profiter de la distribution de dividendes était un associé
unique, qu’il s’agissait d’une société, qui avait pour dirigeant celui qui, était également dirigeant de la société qui va procéder à
la distribution. On comprend son intérêt tout particulier à prendre cette décision de convoquer l’assemblée à cette fin et cette
assemblée ne pouvait que voter la distribution puisqu’il n’y avait qu’un seul associé, représenté par celui qui avait procédé à la
convocation de l’assemblée.

La solution posée par la Cour de cassation a tout autant vocation à s’appliquer dans une société composée de multiples associés.

Dès lors que le dirigeant décide de  convoquer l’assemblée générale pour qu’il soit procédé à une distribution de dividendes, il commet une faute de gestion ayant
contribué à une insuffisance d’actif si effectivement la distribution emporte cette conséquence.


Cette solution doit être rapprochée d’une autre précédemment posée par la Cour de cassation : s’il ne peut être reproché au
dirigeant de ne pas avoir procédé à une augmentation de capital, laquelle est de la compétence des associés, il peut en revanche
lui être imputé à faute de ne pas avoir tenté d’obtenir une augmentation de capital.


Remarquons que, en l’espèce, la Cour de cassation a précisé exactement les trois éléments du triptyque de l’action en
responsabilité pour insuffisance d’actif.


La faute de gestion a entrainé la distribution. Cette distribution est fautive car elle intervient dans un contexte de baisse du
chiffre d’affaires, puis de pertes, empêchant la société d’avoir des réserves et d’inscrire au bilan les provisions correspondantes
à des créances douteuses et à un important procès, ce qui a empêché de payer certaines créances importantes. La faute de
gestion a donc bien contribué à la création d’une insuffisance d’actif et la condamnation se trouve justifiée.

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